ARMOUR : Quand l’amour s’écrit à coups de chocolat !

Ils ont 19 ans et déjà ce regard qui brûle de certitude, une maturité qui désarçonne et une façon de parler de leurs chocolats comme d’autres parlent d’une vie entière à construire. Parce que c’est exactement ce qu’ils font, Chiara Bruneau de la Salle et Timothée Bastien : ils construisent. Avec leurs mains, avec leur cœur, avec cette innocence têtue qui ne sait pas encore que l’impossible existe.

Je les ai rencontrés dans leur laboratoire. Pas un laboratoire classique mais le leur. Une pièce de taille moyenne, chez eux, qu’ils ont transformée en atelier de création, colonisée par des moules thermoformés qu’ils ont dessinés eux-mêmes, des pistoles de chocolat, des tablettes disposées dans des cartons, prêts à être expédiés. Tout respire l’ordre, l’exigence, cette rigueur qui s’inscrit dans le cadre de leur cursus. Avant même qu’ils ne parlent, l’évidence se lit dans leurs yeux. Je ne suis pas face à deux adolescents qui lancent un projet sur un coup de tête mais face à deux artisans décidés à lui donner vie avec toute leur ambition et leur détermination.

Une histoire qui commence sur les bancs de Ferrandi

Leur histoire commence dans les couloirs de Ferrandi, à Paris. Trois années côte à côte, sur les mêmes bancs. Deux parcours qui se dessinent dans des univers distincts : lui au Plaza Athénée sous la houlette d’Angelo Musa, elle, d’abord à la Maison Rostang, puis aujourd’hui au Peninsula Paris auprès de la cheffe Anne Coruble. Toujours ces mêmes conversations passionnées à la sortie des cours, ces mêmes regards qui s’embrasent quand il est question de chocolat, d’un avenir en pâtisserie à inventer ensemble : « D’abord amis, puis un jour un peu plus », me confie Chiara avec ce sourire timide. « Pas de révélation spectaculaire, juste une évidence : on aimait créer ensemble autant qu’on aimait être ensemble. »

Crédit photo : Armour

Et c’est là toute la force d’ARMOUR. Dans ce nom se cachent deux mots : ART et AMOUR. Deux mots qui disent tout d’eux. Leur projet, c’est avant tout une histoire d’amour qui s’écrit à coups de ganache et de praliné, où le chocolat devient la métaphore de leur union. La pâtisserie est leur langue commune, celle dans laquelle ils se comprennent sans avoir besoin de mots.

Un vice-champion du MAF Pâtissier déjà en mouvement

Dans le regard de Timothée, il y a quelque chose qui refuse de s’éteindre, comme une braise ardente. Son titre de vice-champion du MAF Pâtissier 2025 aurait pu être une consécration pour lui mais ce n’était qu’un point de départ. Loin de s’en contenter, cette médaille d’argent l’a poussé à aller plus loin tel un moteur qui l’a mis en mouvement.

Et puis, il y a ce soutien indéfectible derrière eux, Angelo Musa. Le chef-MOF du Plaza Athénée. Celui qui aurait pu se contenter de former un apprenti parmi d’autres mais qui a cru en eux. Qui a goûté leurs tablettes et en a commandé d’autres. Qui leur donne de bons conseils, qui a toujours les bons mots. Un chef au grand cœur accessible et bienveillant. C’est d’ailleurs là que le mot « transmission » prend tout son sens.

Le regard de « la petite maman des MAF » sur Timothée

Il y a des personnes qui veillent dans l’ombre, qui accompagnent sans jamais se mettre en avant. Nathalie Bohbot est de celles-là. Directrice de projet de la Confédération Nationale des Artisans Pâtissiers, en charge de l’organisation des MAF Pâtissier, on l’appelle affectueusement « la petite maman des MAF ». Elle a suivi Timothée depuis le début. Elle l’a vu grandir, mûrir, s’affirmer : « Je trouve qu’il a acquis en maturité et en confiance en lui. À seulement 19 ans, je trouve qu’il a la tête sur les épaules et une maturité incroyable. Il est rare de voir des lauréats MAF en pâtisserie se lancer dans l’entrepreneuriat juste après la finale. Il se distingue par sa rigueur, son sens de l’organisation et une grande maturité. Je suis très fière de lui et de son parcours. Je suis fière de lui ».

Deux voix qui n’en font qu’une

Chiara et Timothée ne se ressemblent pas. Ils se complètent. Là où il tranche, elle arrondit. Là où il impose sa rigueur, elle apporte la sensibilité, l’intuition du beau. Lui pense température de cristallisation, DLC, taux d’humidité. Elle pense expérience client, esthétique, émotion.

Mais quand ils parlent de leurs chocolats, leurs voix se mêlent jusqu’à ne plus former qu’une seule mélodie : « On a imaginé nos chocolats un peu comme des pâtisseries, avec différentes textures, différentes saveurs », m’explique Timothée. « On voit beaucoup de chocolat garnies de ganaches, ou encore de pralinés mais on voit rarement des chocolats avec plusieurs textures comme dans nos barres ou nos tablettes. On voulait vraiment mettre en avant la garniture. » Chiara ajoute : « On avait à cœur de rendre le chocolat esthétique, de pouvoir s’amuser avec, comme personne ne l’a fait avant. »

Le croc, comme signature qui appelle à mordre !

Et justement, parlons-en, de leur signature : un croc. Un croc croqué dans l’angle de chaque tablette, de chaque barre chocolatée. Comme si quelqu’un, peut-être eux, peut-être nous, n’avait pas pu résister à l’envie d’y goûter avant même que le paquet ne soit ouvert. Ce croc, qui est plus qu’une décoration mais résonne comme une injonction à la gourmandise. L’aveu que le beau ne suffit jamais, qu’il faut que ça appelle, que ça tente, que ça provoque le désir.

Pour créer ce moule sur-mesure qui porte leur patte, ils ont tout fait eux-mêmes. Dessiné les formes, imprimé des prototypes en 3D, testé les poids, les épaisseurs, ajusté, recommencé :  « On a fait des essais à l’imprimante 3D », me raconte Timothée. « On est ensuite passés par une entreprise spécialisée dans la fabrication de moules sur-mesure afin que le résultat soit le plus fidèle à nos croquis », me précise Chiara.

Mais déjà, ils rêvent plus loin : « À l’avenir, on aimerait bien pouvoir investir dans une thermoformeuse et les faire nous-mêmes. Pouvoir dire qu’on fabrique tout de A à Z. » Cette soif d’autonomie, cette volonté de tout maîtriser de bout en bout, c’est le cœur battant d’ARMOUR.

Le prix de l’ambition

Sauf que leur ambition a un prix. Un prix qui se paie en heures qui n’en finissent pas, en fatigue qui s’accumule dans les épaules : « On a passé deux semaines fin août à faire la production« , raconte Chiara.  » Le premier jour, j’étais toute seule et j’ai pu faire qu’une seule tournée de barres. C’était, en réalité, plus long que prévu. »


Crédit photo : Armour

Ils font face à la réalité de l’artisanat, à ce temps qu’on ne peut pas compresser. D’abord, il faut faire le flocage, deux passages, deux nuances de couleurs. Puis mouler dans les 25 moules thermoformés et assembler, couche après couche, ce qui prend plus de temps que prévu. Par conséquent, ils ont légèrement augmenté leurs tarifs et ont épaissi un peu les tablettes qui font 1,5 centimètre d’épaisseur :  « On ne voulait pas que les gens se disent que le croc sur les tablettes augmenteraient le coût de celle-ci en diminuant la qualité. » Il y a aussi la flambée des prix du cacao qui rend tout plus compliqué : « Tout notre chocolat, on l’a acheté au premier semestre 2025 », m’explique Timothée. « Mais là, au deuxième semestre 2025, il y a entre 15 et 20 % d’augmentation en fonction du type de chocolat. » Les plantations de la Côte d’Ivoire et du Ghana s’effondrent : arbres malades, climat déréglé.

Malheureusement, tous les chocolatiers ont augmenté leurs prix mais eux, dans tout ça, ils continuent de créer. Même dans leurs prix, il y a de l’honnêteté, de la générosité et beaucoup de gourmandise !

Le choix du chocolat de couverture

Chiara et Timothée ne travaillent pas avec des chocolats d’origine mais avec des chocolats de couverture : « Pour une raison, déjà, de tarif », explique Timothée. « Et surtout, nous, ce que l’on veut mettre en avant, ce sont les garnitures. » C’est un parti pris intelligent. Ils travaillent avec la Chocolaterie de l’Opéra et utilisent des assemblages de plusieurs fèves, ce qui permet de réduire les coûts. « Si un jour on est amenés à faire des tablettes pas garnies, là, on prendra un chocolat d’origine. »

Éco-responsables par conviction

Chiara et Timothée ont fait des choix éthiques dès le départ. Packaging 100 % recyclable, en carton, fabriqué en Bretagne par Thibault Bergeron : « Ça nous tenait vraiment à cœur de travailler avec du 100 % français », ajoute Timothée avec fierté.

Pour le sans gluten, ils réfléchissent encore : « Pour le croustillant, il y a de la feuillantine. Peut-être qu’on peut la remplacer par du riz soufflé », suggère Timothée. En revanche, ils ne sont pas prêts de s’aventurer sur le terrain du végan : « Nous n’avons jamais été friands de pâtisseries véganes », reconnaît Chiara. « C’est très complexe, presque de la chimie. » renchérit-elle. Consciencieusement, ils préfèrent laisser ce travail à ceux qui le maîtrisent vraiment.

Leurs modèles inspirants

Quand je leur demande qui les inspire, Chiara cite d’abord Marine et Maxime de MichocoMigato :  « Ils sont partis de rien. Ils ont ouvert un petit food truck sur le marché du Vésinet. Et maintenant, ils ont un grand laboratoirel et ont ouvert une deuxième boutique. » Ce modèle-là, c’est exactement le leur. Partir de rien ou presque et construire pas à pas.

Mais ils admirent aussi profondément Angelo Musa pour sa gentillesse, son humilité, sa bienveillance et son sens de la transmission. « C’est un chef très connu, il est MOF. Mais il reste humble et a la passion de transmettre son savoir-faire. Il a toujours les bons mots au bon moment. Sa transmission de l’humilité est l’une des plus belle valeurs » renchérit Timothée..

Leur rêve : une boutique physique, un jour

Pour l’instant, ARMOUR n’existe qu’en ligne. Mais leur rêve, le vrai, celui qui fait briller leurs yeux, c’est une boutique physique :« le but ultime de notre projet est que ça aboutisse sur une boutique physique, parce que c’est notre rêve à tous les deux », me confie Timothée.

En attendant, ils construisent. Ils pensent aux partenariats avec des restaurants : « Des restaurants qui ont une clientèle assez aisée, puisque le bon chocolat, quand même, a un coût. » Ils réfléchissent au sur-mesure : « On peut proposer quelque chose d’exclusif et on peut faire des moules adaptées », ajoute Chiara.


Crédit photo : Armour

Mais pour l’instant, ils mènent une double vie. Le jour, commis dans de grandes maisons : elle au Peninsula, lui au Plaza Athénée. La nuit et les week-ends, fondateurs d’ARMOUR.

Noël et les projets à venir

Pour Noël, ils ne proposeront pas de gamme spécifique : « On vient de débuter, on a déjà notre stock à écouler », explique Chiara. « Mais par contre, on réfléchit, pour la Saint-Valentin, à des bonbons gourmands spéciaux.« 

Ils ont aussi déjà une gamme de pâtes à tartiner au spéculoos maison ou à la noisette : « On fait tout maison car cela nous tient à coeur », me dit Timothée.

Leur gamme complète est déjà impressionnante. En tablettes de chocolat : pistache, noix de pécan, noisette (lactée et intense). En bonbons de chocolat : café, fruit de la passion et noix de pécan, vanille et cacahuète. En barres de chocolat : citron-sésame noir, pistache-tonka et vanille. Des coffrets tout chocolat noir, tout chocolat lait ou d’un seul parfum.

À 19 ans, Chiara Bruneau de la Salle et Timothée Bastien ont déjà compris quelque chose d’essentiel : que les rêves ne se réalisent pas par magie, mais par obstination. Que l’amour ne suffit pas, qu’il faut aussi beaucoup de travail, de rigueur et de persévérance. ARMOUR, c’est tout ça à la fois. Une histoire d’amour et de courage qui se conjugue au présent et au futur. 

Je les regarde une dernière fois avant de partir. Ils sont déjà retournés à leur table de travail, penchés sur leurs commandes à envoyer. Leur histoire commence ici, dans ce petit atelier et j’ai l’intime conviction qu’elle ne s’arrêtera pas de sitôt ! 

ARMOUR Chocolaterie

Boutique en ligne : www.armour-patisserie.com (Livraison dans toute la France)

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